On était le lundi 28 septembre, à 9h30 du matin. Douze jours après son entrée dans la ville, il ne restait plus un seul soldat de la Grande Armée dans Moscou.
La campagne de Russie a conduit les forces de Napoléon jusqu’à Moscou. Mais dans le Kremlin déserté par ses occupants Napoléon décide rapidement de ne pas attendre l’hiver russe.
Cependant un repli le rendrait vulnérable aux forces reconstituées du maréchal Mikhaïl Koutouzov. La ruse doit entrer en action. Et c’est ainsi qu’il charge le colonel François Beille (promu général pour l’occasion) d’une action de retardement. Sa mission : se faire passer avec ses faibles troupes pour toute la Grande Armée pendant que cette dernière se dirige vers l’Europe de l’Ouest.
Le point de divergence de cette uchronie se situe dans la décision de Napoléon de quitter Moscou le 28 septembre 1812 et non le 18 octobre. Ces trois semaines d’avance contre le gel et la neige devraient permettre un repli vers des lignes de communication et de ravitaillement plus courtes et donc plus sures. Mais il s‘agit également pour l’empereur Napoléon d’obliger les forces russes à sa poursuite à l’affronter sur un terrain choisit par lui.
Les évènements sont relatés par le général Beille (un Auvergnat tout comme notre ancien président de la République). Il s’efforce de remplir la mission impériale tout en préservant le maximum de ses troupes. De plus il s’est donné mission de ramener avec lui les civils étrangers principalement français établis à Moscou. Parmi ceux-ci on notera la présence d’une servante française nommée Marie-Thérèse et de la comtesse russo-polonaise Krystyna Kalinitzy. Bien entendu rien ne doit détourner un général français de son devoir et... passons.
Cette chronique d’une Histoire divergente s’accompagne de rencontres avec des personnages historiques. Outre l’Empereur et le général Poniatowsky, voici le général Oudinot à nouveau blessé (au cours de sa carrière il reçut 34 blessures par balles, sabre et boulet), ainsi que la charmante Maria Walewska (noble polonaise surtout célèbre en raison d’un évènement survenu neuf mois après sa rencontre avec Napoléon Bonaparte et...passons).
Au cours du périple il arrive que le narrateur auvergnat procède par allusions. Ainsi est évoquée la mort d’un officier polonais dans la forêt de Katyn (1).
De même on trouve dans la bouche d’un des protagonistes historiques les propos suivants : «
Pour la république, on a pu vérifier que les citoyens français étaient incapables de la gérer : trop agités, trop impulsifs, n’acceptant que les lois qui leur sont favorables, et préférant élire des médiocres pour ne pas se sentir dominés ». Il s’agit bien entendu des paroles d’un des personnages du roman et non de l’auteur évidemment...Mais, puisqu’on vous le dit.
Cette uchronie souffre en apparence d’un défaut : son titre. « La victoire de la Grande Armée » indique que Napoléon va l’emporter sur les forces russes. Cependant l’intérêt de cette divergence avec l’Histoire officielle ne repose pas sur des évènements militaires, mais sur des décisions politiques. Car vaincre l’armée russe n’empêcherait pas l’Angleterre de former une 7° coalition. La solution est originale et cohérente sur le plan géopolitique et débouche sur une nouvelle organisation européenne.
(1) En 1940 dans la forêt de Katyń le NKVD (police politique de l’Union Soviétique) élimina des milliers de Polonais principalement des officiers. Le nombre de victimes est estimé par les Russes à 14 540
Damien Dhondt
Auteur : Valéry Giscard d’Estaing _ La Victoire de la Grande Armée _ Edition : Plon _ octobre 2010 _ Inédit, grand format, 320 pages _ 21,50 euros