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Scénario : Max Landis, d’après le roman de Mary Shelley
Avec : James Mc Avoy, Daniel Radcliffe, Jessica Brown Findlay, Andrew Scott, Charles Dance.
Distribué par 20th Century Fox - 109 mn - Sortie le 25 Novembre 2015 - Note 9 /10
N’en déplaise à certains voire à beaucoup, « Frankenstein » de Mary Shelley n’est pas un chef-d’œuvre mais un classique de la littérature fantastique. Ceci étant, un avis personnel sur un roman quand même assez… pesant à lire. Logiquement, on peut donc trouver un intérêt relatif aux adaptations cinéma et télévisées de ce roman. Sauf les « dissidentes » telles que le superbe « Gods and Monsters » de Bill Condon, ou l’excellente parodie « Frankenstein Junior ». Sinon, il y a le classique – hé oui, encore ! – de James Whale, plus toutes les autres adaptations que grand écran et petit écran proposèrent depuis, en passant par le Kenneth Branagh - très… Kenneth Branagh ! -, qui en soi ne proposent rien de bien passionnant et novateur. Ah oui, il ne faut pas oublier els petites séries B voir Z, dont récemment le « I, Frankenstein » à oublier très vite. Et voici qu’arrive aujourd’hui « Docteur Frankenstein », écrit par Max Landis – le fils de… - , qui propose un autre regard sur cette histoire, une autre approche, qui arrive donc à faire du neuf avec du (très) vieux, qui arrive à surprendre en prenant une voie inédite et en même temps respectueuse du matériau d’origine pour au final, et avec les talents conjugués de chacun, livrer une vision étonnante et moderne du classique, et du mythe, au point de constituer ce qui peut sans trop de soucis se poser comme étant une des meilleures adaptations / relectures tirées de l’œuvre de Mary Shelley.
Depuis des années, il œuvre dans un cirque en tant que clown, cachant son handicap sous des pitreries qui amuse la galerie. Pourtant, un soir, tout va changer : en sauvant par ses connaissances médicales qui forment ses uniques passions une belle trapéziste, il fait ainsi la connaissance d’un autre scientifique, Victor Frankenstein. Ce dernier l’aide à fuir le cirque, le guérit d’une bosse qui n’en était pas vraiment une, et lui offre d’être son assistant dans des expériences que l’époque juge contre-nature mais qui constituent à ses yeux des avancées de la science. Ainsi, Igor, nouvellement baptisé par Frankenstein, va se hisser petit à petit à un niveau de connaissances qu’il avait en lui mais qui n’avaient pas encore été mises à jour. Mais en même temps, sa conscience va le pousser à revoir son admiration pour son mentor, surtout quand il va être question de redonner vie à ce qui est mort…
Qui aurait pu penser qu’un jour, on puisse être ainsi véritablement et nouvellement intéressé par cette histoire qui jusqu’à aujourd’hui ne sortait guère de son ornière ? Déjà, en faisant d’Igor une sorte de témoin moral et en même temps, partenaire dans les expériences scientifiques telles que tout érudit en ce domaine ne vit que pour aller plus loin que ce qui est déjà acquis, est en soi un audacieux pari qui trouve pourtant ici sa réussite. Certes, Daniel Radcliffe interprète parfaitement cette innocente intelligence découvrant enfin les plaisirs de la vie et de l’expression de ses fabuleuses aptitudes intellectuelles, ce qui constitue en soi un atout de base malgré un petit air « droopiesque » parfois très accentué. Mais face à lui, James McAvoy emporte complètement l’adhésion en faisant de ce nouveau Dr Frankenstein, un savant non pas fou mais simplement plus que passionné et aux motivations bien plus humaines qu’on ne le pensait. Le tout se déroulant dans une reconstitution d’un Londres ahurissant – on songe ainsi à « From Hell », autre réussite de résurrection d’horreurs dans une capitale quelque part simplement parfois cauchemardesque -, et auquel s’adjoint des intrigues parallèles qui loin de gangréner l’histoire principale, lui donne une dimension plus riche, variée et crédible. Bien entendu, le monstre n’est pas oublié et là encore, on ne peut qu’admirer un final complètement dantesque, terrifiant, très respectueux de certaines œuvres passées et même du roman de base. Et jusqu’à l’image finale, « Docteur Frankenstein » maintiendra ce niveau de qualité, tant en écriture qu’en réalisation (Max Landis et Paul McGuigan signant respectivement leur travail le plus complet et abouti de leur carrière à ce jour), faisant de cette nouvelle version, terme plus approprié qu’adaptation, certainement une des meilleures qui soit. Si je m’écoutais, je dirais même… Oui, peut-être la meilleure.
Stéphane THIELLEMENT
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