d’André Rouillé
Les photos argentiques étaient des images-choses statiques, à regarder. Les photos numériques sont des images dynamiques, à échanger. Elles circulent en flux ininterrompus sur les réseaux planétaires : à la fois incorporelles et agissantes, ce sont des forces à part entière.
Elles instillent subrepticement et continûment dans la subjectivité de chacun la rationalité néolibérale : instantanéité, accélération, fluidité, circulation, horizontalité, partage et ubiquité. Cette dissémination du modèle du marché – même là où il n’est pas question d’argent – fait exploser les anciennes limites entre l’ici et l’ailleurs, la nation et le monde, le privé et le public.
Dans le sillage de Theodor Adorno qui a théorisé l’art comme fait social, l’auteur, un des meilleurs connaisseurs de l’histoire de la photographie et des images, élabore une critique globale des processus esthétiques, techniques, économiques et politiques à l’œuvre actuellement. Il montre comment la photo-numérique a ouvert une nouvelle ère qui se caractérise par la profusion d’images aberrantes, l’apparition de nouveaux pouvoirs, l’essor d’une nouvelle économie et la fabrique d’un individu néolibéral.
André Rouillé, enseignant-chercheur à l’université Paris-8, dirige depuis 2002 le site paris-art.com consacré à l’art, la photo, le design et la danse. Il a publié huit livres sur l’histoire et l’esthétique de la photographie argentique qui font référence et ont été traduits notamment en anglais, espagnol, portugais, russe et chinois.
Damien Dhondt
Auteur : André Rouillé _ La Photo numérique Une force néolibérale _ Éditions l’échappée _ Parution le 8 octobre 2020 _ Inédit, grand format, 224 pages _ 17 euros