Edition : Presse de la Cité
427 pages
1999
Verdict : 7 / 10
Il y a six portes dans la ville de Londres, prétend une comptine célèbre. En voulant connaître la vérité cachée derrière ces quelques mots, Josh et Nancy, deux Américains sans histoire, plongent dans l’enfer des mondes parallèles. Ils atterrissent dans un Londres alternatif, sous la domination des Cagoulés, des fanatiques religieux punissant de mort l’hérésie.
Masterton, depuis le milieu des années 90, tente d’élargir son lectorat. Ce n’est un secret pour personne. Ses intrigues délaissent les éléments ayant jadis assuré sa réputation (sexe, sang, démons, atrocités diverses) pour privilégier les scénarios grand public. Stephen King ou Dean Koontz n’aurait pas pu écrire "Transe de Mort" ou "Rituel de Chair". Par contre, ils auraient certainement pu signer ce roman.
L’horreur y est limitée à une portion si congrue que l’on se situe davantage dans le fantastique pur, pour ne pas dire la fantasy. Mieux vaut être prévenu. Au niveau du style et de la construction littéraire, on retrouve les tics et défauts du romancier. Tout d’abord une acceptation totalement invraisemblable du surnaturel : une vieille femme mumure une comptine, une médium vous offre une séance gratuite et vous êtes prêt à croire à l’occulte, aux mondes parallèles, aux esprits, etc. Scully où es tu ?
Autre défaut coutumier : un rythme haletant mais parfois mal équilibré. Certains passages sont ainsi peu développés, voire expédiés. Même si il utilise la technique éprouvée du découpage de l’action en chapitres parallèles afin de faire monter le suspense, Masterton n’arrive toujours pas à donner à l’intrigue une conclusion valable. 400 pages denses et riches pour aboutir à un final bâclé où tout se résout en une minute, cela paraît facile. Mais l’écrivain se repose souvent sur ce genre de facilité et on peut, une fois de plus, le déplorer.
Sinon, comme d’habitude, le métier impressionne et le bouquin se lit quasi d’une traite : dès sa lecture entamée, on ne parvient plus à le lâcher.
On attend le jour où Masterton prendra un peu plus de temps pour présenter ses personnages (certains sont clichés à souhait) et s’appliquera à écrire une conclusion à la hauteur de l’intrigue développée.
Mais on regrette de ne pas retrouver la puissance évocatrice et la barbarie sanglante de ses œuvres des eighties comme les inégalés "Portrait du Mal", "Démon des Morts", "Démences" ou "Tengu".
Bien ficelé mais un brin décevant, donc, ces Gardiens de la Porte assure néanmoins de belles heures d’évasion.
Fred Pizzoferrato (2004)