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Avec Brigitte Lin, Leslie Cheung
Studio Canal Vidéo
Un chef d’œuvre hyper attendu en DVD. Je pourrais m’arrêter là. Mais autant expliquer pourquoi Jiang-Hu mérite ce label. Alors que beaucoup s’extasiaient devant Histoires de fantômes chinois, certains restaient absolument hermétiques à l’humour asiatique, à ces fantômes qui volaient partout, à une histoire qui ne se révélait guère passionnante (là, ma tête va peut-être mise à prix !). Du coup, lors du 1er Festival de Gerardmer baptisé alors Fantastica (Fantastic’Arts survint deux, trois ans plus tard suite à une plainte pour le logo Fantastica déjà utilisé par un magazine...), quand on projeta ce Jiang-Hu, aussi baptisé The bride with white hair, inutile de dire que l’engouement se révéla très timide. Pourtant, une fois dans la salle, une fois les premières images révélées, une fois le film dévoilé dans son intégralité, oublié les Histoires de Fantômes chinois, le genre pouvait aussi avoir des chef d’œuvres et Jiang-Hu en était la preuve. L’histoire à la base prend les thèmes classiques des romances maudites, ici entre une sorcière élevée par des jumeaux siamois et un jeune guerrier appartenant au clan de leurs ennemis. Quand ces deux-là se rencontrent, c’est le coup de foudre, en même temps que le déclenchement de massacres entre chaque camp adverse, et surtout la vengeance impitoyable du jumeau mâle amoureux fou de sa « protégée ».
Les qualités de Jiang-Hu sont nombreuses. Tout d’abord, esthétiquement, on frôle le sublime. Même la scène d’amour, qu’on pouvait craindre (sur le papier) mièvre voir cucul la praline, transcende tout ce qu’on redoutait pour plonger dans un total étourdissement de beauté. Ensuite, on évite surtout tout humour propre à ces films, pour se concentrer sérieusement sur l’histoire d’amour, d’honneur et de vengeance qui constitue tout le film. Et là où Jiang-Hu se différencie complètement des autres, c’est par cette volonté d’être sérieux, voir violent, voir même horrifique et limite malsain. Ainsi, les combats peuvent parfois se solder par des décapitations, et les relations entre le frère et la sœur, jumeaux siamois maléfiques, donnent quand même cette note différente mais ô combien bienvenue dans un tel film. L’ensemble s’harmonise parfaitement pour donner un pur joyau du genre, passionnant, stupéfiant, somptueux et qui donna à Ronny Yu (connu par la suite pour son excellent Bride of Chucky, ainsi que Le 51ème état, que lui confia Samuel Jackson à cause de sa passion pour Jiang-Hu ! Et aussi pour son décevant Jason contre Freddy) ses lettres de noblesse. Le film décrocha le Grand Prix du 1er Festival de Gerardmer, présidé à l’époque par Walter Hill. Il ne sortit jamais en salles mais au moins il amorçait bien le Festival. 12 ans après, c’est l’exécrable Troubles qui remporte la compétition. Mmouais, passons. Pour terminer sur Jiang-Hu, on dira qu’il s’agit là de la meilleure copie du film disponible en DVD (la rage de ceux qui l’avaient acheté à Hong Kong est légendaire !), et qu’en bonus, on a un long entretien avec Ronny Yu, un monsieur adorable, surprenant (il est atteint de poliomyélite depuis son enfance, ce qui l’empêche de se mouvoir comme le commun des mortels, mais il fait des films remplis d’une vitalité incroyable !) qui revient sur la genèse du film. C’est tout, rien d’autre mais parfois, ça suffit amplement.
Stéphane Thiellement
Note : 10/10 DVD : 6/10 (copie excellente, format d’origine 1.85 image 16/9ème)
Bonus : interview 30 mn de Ronny Yu ; filmographies
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