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Avec Julian Sands, Elsa Pataky, John Sharian
CTV Vidéo
Depuis quelques années, le cinéma espagnol revit de manière spectaculaire et ce dans tous les genres. Le Fantastique est ainsi à l’honneur, amorcé par Alejandro Amenabar que suivirent bientôt de jeunes cinéastes surdoués qui trouvèrent leur financement au travers de sociétés croyant en leurs aptitudes. Parmi elles, la Fantastic Factory, elle-même filiale de Filmax, co-créée par Brian Yuzna, cinéaste-producteur qui commença avec « Ré-Animator » avant de passer derrière la caméra pour « Society », « Le dentiste », « Le retour des morts-vivants 3 », etc... Et c’est ainsi que l’on découvrit le talentueux Jaume Balaguero avec son traumatisant « La secte sans nom », puis « Darkness » plus abouti et maitrisé et très bientôt « Fragile » qui sera diffusé très prochainement directement sur Canal Plus sans passer par la case « sortie en salles », mais qui fera quand même l’ouverture de Gerardmer 2006. Dans son ombre, on découvrit Paco Plaza et son plutôt bon « Les enfants d’Abraham » qui rappelait un peu trop « La secte sans nom » (tous deux tirés d’un roman de Ramsay Campbell, même ambiance, même photo, etc...). Et voici aujourd’hui le second film de Paco Plaza, précédé d’une très mauvaise réputation depuis sa vision au marché du film de Cannes 2004. Inutile de dire qu’on attendait « L’enfer des loups » au tournant. Hé bien, à la surprise générale, Paco Plaza n’a pas à avoir honte de son film, enfin en ce qui me concerne. Maintenant, ce sera à vous de voir...
En 1850, en Gallice, une des plus belles régions d’Espagne, des meurtres sauvages ensanglantent la quiétude de ses habitants. Des marques de déchirures couplées à des coupures très nettes font avancer l’hypothèse d’un loup-garou. Un homme, Romasanta (Julian Sands, plutôt bon dans la peau du personnage pour une fois), rentre chez lui après des mois passés sur les routes pour commercer. Il retrouve sa femme, sa petite fille muette et sa séduisante belle-sœur Barbara (très belle Elsa Pataky). Suite à un départ précipité auquel cette dernière n’est pas conviée, Romasanta revient plus tard seul, ayant installée sa famille dans la grande ville voisine selon ses dires. Mais des soupçons commencent à naitre dans l’esprit de Barbara, jusqu’à ce qu’elle acquiert la certitude que Romasanta a massacrer les siens, et serait bien ce tueur qui terrorise toute la région. Mais qui est vraiment Romasanta : un homme ou...
Et là, on ne le saura jamais vraiment. Gros budget, dont l’échec faillit coûter la vie à la Fantastic Factory, unanimement détesté lors de sa projection en 2004 à Cannes donc, il s’avère que « Romasanta » n’esp vraiment pas du tout un film d’horreur fantastique comme il était vendu. Il s’agirait plus d’une étude d’un serial-killer ayant frappé la Gallice il y a un siècle et demi. Tout tourne autour de ce Romasanta dont la schizophrénie fut une manne incroyable pour les rares scientifiques de l’époque : en effet, l’homme prétendait être un loup-garou quand il tuait ! De cela, le film ne tire qu’une séquence, fort belle au demeurant, entièrement fantastique, mais qui est un tantinet incongrue dans l’ensemble puisqu’autrement, rien ne vient prouver la lycanthropie de Romasanta. Autrement, « Romasanta » est très bien servi par une très belle réalisation d’un Paco Plaza qui demeure un des meilleurs jeunes espoirs du renouveau du fantastique espagnol. Ces séquences avec ces personnages flous en arrière plan servent admirablement l’ambigüité de cette histoire, mélange de passion et de mort, d’innocence et de malédiction dont certaines scènes tombent carrément dans une horreur bien palpable comme celle où les victimes sont dépecées ou, pire encore, celle de l’oiseau-papillon, témoignage sans équivoque de la réelle folie de Romasanta. A part cela, difficile de rejeter une telle œuvre tant son originalité et le soin apporté à sa concrétisation en font un film qu’il faut découvrir en oubliant tout ce qu’on voit et lit sur la jaquette : « Romasanta » est bien plus original que ce qu’on lit de prime abord. Maintenant, l’édition DVD se veut assez riche puisqu’on y trouve en morceau de choix un long documentaire sur le vrai Romasanta au travers d’interviews d’historiens espagnols, un making-of fragmenté où on y voit Paco dirigé le plus sérieusement du monde son second film qui est en même temps la concrétisation d’un vieux rêve d’enfant puisque cette histoire semble avoir en Espagne la même renommée que notre « Bête du Gévaudan », qui inspira Christophe Gans pour son « Pacte de loups » (dont l’affiche inspira bien celle de « Romasanta » : mauvaise idée, ça...), chez nous. Des scènes coupées sans grand intérêt complètent cette édition finalement assez complète pour un film à découvrir en occultant tout ce qui a été dit et entendu auparavant. Voir « Romasanta » avec un œil neuf et l’esprit fermé aux mauvaises rumeurs ne pourra que servir le plaisir de découvrir la nouvelle œuvre du talentueux Paco Plaza, en attendant son chef-d’œuvre qu’il finira bien par nous pondre un de ces jours.
Note : 7/10 DVD : 8/10 (copie excellente, format d’origine 2.35 image 16/9ème, compatible 4/3 )
Bonus : Making-of, documentaire sur l’histoire vraie de Romasanta, interviews, story-board commenté, scènes coupées commentées ou non.
St. THIELLEMENT
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