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Avec Vincent Price, Elizabeth Shepherd.
Sidonis Vidéo
Un grand classique de l’époque de l’épouvante des années 60, genre qui se partagea entre la Hammer et Roger Corman. Mais pas un chef-d’œuvre non plus, même s’il n’en est pas loin. Mais dans la carrière du pape d’un Septième Art voué aux séries B à Z (surtout Z d’ailleurs) qu’est Roger Corman, « La tombe de Ligeia » constitue certainement un de ses trois meilleurs films. Peut-être même le meilleur, certainement le plus beau, écrit par un futur grand scénariste hollywoodien, Robert Towne (« Chinatown » pour ne citer que son scénario le plus abouti et parfait, réalisateur aussi de l’excellent et injustement méprisé « Tequila sunrise »), et tourné pour la première fois en décors naturels, magnifiques au passage, envoûtants, poétiques trouvés dans la campagne anglaise avec des ruines superbes et même un plan lointain qui rappelle « la fille de Ryan » de David Lean, c’est dire. De la part de Corman, et même encore plus que « Le masque de la mort rouge », mais loin d’être du niveau de celui-ci, « La tombe de Ligeia » peut se considérer comme étant le film de Corman à posséder obligatoirement tant il montre le talent d’un cinéaste qui, avec des moyens divers et variés conséquents, pouvait signer une œuvre qui rentre aujourd’hui dans les classiques du genre...
Verden Fell est un riche propriétaire qui vient d’enterrer sa femme Ligeia. Il vit en reclus dans les vestiges d’une vieille abbaye que sa femme avait décidé de prendre comme demeure. Le jour où il croise Lady Rowena, Fell en tombe amoureux et pense pouvoir s’exorciser de l’emprise malsaine qu’exerce sa femme sur lui-même par delà la mort. Si tout semble se passer sous les meilleurs auspices dès qu’ils quittent l’abbaye, le retour marque pour Fell la fin d’un espoir de vrai retour à la vie. L’ombre de Ligeia plane encore sur les lieux et l’esprit de son mari, transformant le quotidien de Lady Rowena en véritable enfer. Aidé par un fidèle ami, Rowena va tout faire pour percer le mystère entourant Ligeia et pouvoir ainsi vivre avec Vernon le bonheur auquel elle aspire pour eux deux.
Tiré d’une nouvelle de Poe et faisant partie d’un cycle de films inspirés, plus ou moins directement, de l’écrivain, « La tombe de Ligeia » est une plongée dans la mort et la folie comme savait si bien les mettre en place Poe. Retrouvant l’ambiance propre de ses écrits, Robert Towne signe un scénario simplement excellent, magnifiant l’héroïne, prisonnière de l’amour qu’elle porte à un homme qui peut causer sa perte, jouant avec subtilité via des éléments plus qu’étranges (dont un chat noir sert de lien) sur l’éventuel surnaturel du mystère lié à Ligeia, le tout porté à l’écran par un Roger Corman inspiré, peut-être par la beauté de ses extérieurs, les plus importants de sa carrière. Même le générique d’ouverture est de toute beauté. Malgré ces évidentes qualités, il manque à « La tombe de Ligeia » un peu plus de rigueur pour être le chef-d’œuvre qu’il aurait pu être. Certains passages rappellent que Corman est le spécialiste des petites choses qui font économiser beaucoup d’argent mais qui ne devraient pas figurer dans un tel film. En l’état, « La tombe de Ligeia » est un classique du genre, de ceux qui se démarquent aisément des autres. Servi par une copie magnifique, d’une propreté surprenante (si restauration il y eut vraiment, elle est visible pour une fois !), rendant toute leur richesse à ces extérieurs fantastiques, l’édition DVD propose deux bonus qui à eux seuls donnent le titre approprié de « Collector » : déjà, il y a Joe Dante qui revient sur l’époque Corman qu’il connut bien puisqu’il y amorça son métier. Ensuite, Bertrand Tavernier, alors à l’époque de la sortie du film en salles attaché de presse, revient sur la richesse de l’univers Corman, mettant en avant le meilleur de sa carrière dont « La tombe de Ligeia ». Comme d’habitude chez Tavernier, l’étude est passionnante, pas du tout redondante ou ennuyeuse, et en même temps, très juste quant au film. A savoir que ce n’est pas un chef-d’œuvre mais bel et bien un classique, et certainement le meilleur film signé du réalisateur Roger Corman.
Note film : 7/10
DVD : copie excellente, format d’origine 2.35, image 16/9ème - Bonus : 8/10 : Le film & Roger Corman vu par Bertrand Tavernier - Corman par Joe Dante - bande-annonce.
St. THIELLEMENT
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