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Tous vos pensionnaires sont voués à disparaître lorsque les travaux seront achevés. Ne laissez sortir que des cadavres. Tels sont mes ordres !
Jeune idéaliste Gen Rokkôji n’apprécie guère le militarisme qui réapparaît au Japon. Après avoir été confronté aux mutants révolutionnaires de l’île de Déjima (1) le voici aux mains des autorités. Elles ont besoin de main-d’oeuvre pour un projet ultrasecret pour le compte des Américains, tellement secret qu’aucun officiel japonais n’en a connaissance. Aussi on y envoie clochards, délinquants ou suspects dans ce qui est officiellement une clinique psychiatrique et où les "patients" doivent être éliminés une fois les travaux effectués.
On remarquera le paradoxe où un officier japonais paranoïaque s’adresse à un psychiatre dans un faux hopital psychiatrique et déverse sa méfiance et sa haine xénophobe envers les Américains qui selon lui soupçonnent toujours les Japonais de dissimuler quelque chose.
Dans cette uchronie le Japon connaît un regain de nationalisme où l’extrême droite se réjouit de participer à la guerre du Cambodge aux côtés des Américains. Pacifiste, Gen subit la répression policière similaire à celle de la seconde guerre mondiale.
Curieusement l’antiaméricanisme primaire d’un des méchants de l’histoire rejoint parfois le propos de certains des héros. Ainsi l’un d’eux victime de la maladie de Moiké ( au lieu de maladie de Minamata dans notre univers) envisage que cette épidémie serait due à un accident dans une usine d’arme bactériologique travaillant au Japon pour l’armée américaine.
De même des soldats japonais auraient été victimes d’un accident. Une arme bactériologique américaine et que les Américains auraient fait manipuler par des Japonais aurait explosé prématurément. Fabriquer et faire manipuler une arme de destruction massive par des alliés (et anciens ennemis !) est assez peu vraisemblable de la part des USA. On retrouve la volonté de refuser la faute de son pays en détournant la responsabilité vers un autre.
(1) il s’agit d’une double allusion d’une part aux malformations des bébés ( appelée maladie de Minamata) nés à proximité de l’usine Chisso rejetant du mercure, d’autre part à l’île Dejima où furent parqués les marchands européens de 1641 à 1853
Damien Dhondt
Scénario & dessin : Tatsuhiko Yamagami, postface Yûki Mori & Patrick Chesnet_ Les vents de la colère, tome 2 _ Traduction : Jacques Lalloz & Patrick Honoré ( Orbis-Tertius), Adaptation graphique : M. Beu-Beu, Coneption graphique : Trait pour trait _ Delcourt, Akata, collection Fumetsu (octobre 2006) _ Inédit, poche, 288 pages noir & blanc, sens de lecture japonais, 8,50 euros
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